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Bernard Tollec

Les secrets cachés des solutions : Comment la déviance positive transforme le monde - un cousin de l'appreciative inquiry



Lorsque nous regardons un problème complexe, notre première réaction est souvent de chercher à résoudre ce qui ne fonctionne pas. Mais si la clé était déjà sous nos yeux, dissimulée dans les pratiques existantes de ceux qui, malgré des conditions défavorables, réussissent là où d’autres échouent ? Bienvenue dans l’univers fascinant de la déviance positive, une approche qui change la donne en matière de développement et de transformation sociale.


La déviance positive et l'Appreciative Inquiry sont toutes deux centrées sur la valorisation des forces et des solutions existantes, cherchant à amplifier ce qui fonctionne déjà plutôt que de se focaliser sur les problèmes.


Pourquoi nous ignorons ce qui fonctionne déjà ?


Trop souvent, nous pensons que les solutions doivent venir de l'extérieur, d'experts, de nouvelles théories ou de grandes réformes. Pourtant, la déviance positive nous enseigne qu’avant même que des intervenants externes ne débarquent avec leurs compétences, les réponses aux problèmes existent déjà dans la communauté. Mais pourquoi ne les voyons-nous pas ? La réponse réside dans notre propension à ignorer les solutions subtiles qui fonctionnent déjà, préférant chercher ailleurs, là où nous n’avons pas encore regardé.

Robert Frost, dans l’un de ses célèbres poèmes, a une métaphore parfaite pour cela : « Nous dansons en cercle, supposant, mais le secret est au milieu, il sait. » La déviance positive est ce « secret au milieu », une vérité qui existe déjà mais que nous devons apprendre à reconnaître et à exploiter.


L’expérience vietnamienne : Quand la déviance positive sauve des vies


Retour en 1990. Gerry Sternin, accompagné de son épouse Monique et de leur fils de dix ans, arrive à Hanoï pour ouvrir un bureau pour l'ONG Save the Children. Le défi est immense : dans certaines régions du Vietnam, plus de 65 % des enfants de moins de trois ans souffrent de malnutrition modérée à sévère. Le gouvernement vietnamien leur donne six mois pour montrer des résultats, sous peine de voir leur visa révoqué.

Gerry et Monique ne sont ni experts en nutrition ni spécialistes du Vietnam. Ils ne parlent pas la langue et ne connaissent pas la culture locale. Mais ils décident de faire appel à un concept alors peu connu : la déviance positive. Leur idée ? Trouver les familles très pauvres dont les enfants sont pourtant bien nourris et comprendre ce qu’elles font différemment des autres.

Les résultats sont stupéfiants. Les familles « déviantes positives » intègrent des pratiques inhabituelles mais efficaces dans l'alimentation de leurs enfants, comme ajouter des crevettes et des crabes récoltés dans les rizières, ou utiliser les feuilles supérieures de la patate douce. Ces aliments, riches en protéines et en vitamines, sont disponibles mais souvent négligés par la plupart des familles locales. En seulement un an, 1 000 enfants sont réhabilités durablement grâce à ces pratiques.


Le pouvoir de la déviance positive dans les communautés locales


Ce qui rend cette approche si révolutionnaire, c'est qu'elle ne nécessite pas de grandes ressources ou d'interventions extérieures coûteuses. Tout est basé sur l’identification de solutions locales, ancrées dans les pratiques culturelles et sociales. Et c'est précisément ce qui a permis à ce programme de passer de quelques villages à un modèle national.

En trois ans seulement, le programme de nutrition vietnamien, basé sur la déviance positive, devient une référence nationale. En 2000, dix ans après son lancement, plus de 2,3 millions d'enfants vietnamiens ont été sauvés de la malnutrition. Cette approche s'est répandue dans plus de 41 pays à travers le monde, s'attaquant à une variété de problèmes sociaux, allant de la malnutrition à la prévention des maladies infectieuses.


Une approche qui brise les barrières culturelles


La véritable force de la déviance positive est sa capacité à transcender les frontières culturelles. Gerry et Monique Sternin ont compris très tôt que pour réussir dans une nouvelle communauté, ils devaient avant tout apprendre à écouter. Lors d'une mission en Éthiopie, ils se retrouvent face aux Afar, une tribu de nomades réputée pour sa méfiance à l'égard des étrangers. Pendant trois jours, ils se rendent au point d’eau local, s’assoient au sol et écoutent les membres de la tribu discuter de leur quotidien.

Le troisième jour, un traducteur leur confie qu’un des anciens a dit à son voisin : « C'est extraordinaire, ils sont venus s'asseoir à nos pieds et écouter. Même nos enfants ne nous montrent pas un tel respect. » Cette ouverture, gagnée par le simple fait de respecter la culture et d'écouter attentivement, a permis à Gerry et Monique de bâtir une relation de confiance, où les solutions locales pouvaient enfin émerger.


Leçons pour aujourd’hui : Apprendre à écouter avant d’agir


L’un des plus grands enseignements que nous pouvons tirer de la déviance positive est l’importance de l’écoute active. Souvent, dans notre empressement à résoudre des problèmes, nous oublions de prêter attention à ceux qui vivent ces difficultés au quotidien. Pourtant, ils détiennent souvent la clé du changement. Ce fut le cas dans de nombreuses communautés où la déviance positive a été mise en œuvre : les solutions étaient déjà là, cachées dans les pratiques quotidiennes des individus.

Prendre le temps d’écouter, de comprendre et d’observer ce qui fonctionne déjà peut sembler simple, mais c’est une démarche puissante et sous-estimée. Nous devons apprendre à poser les bonnes questions et à valoriser les connaissances locales autant que les solutions technologiques ou scientifiques.


Gerry Sternin : Un homme au service de la communauté mondiale


Derrière cette méthode se cache un homme dont la vie était un exemple vivant de cette philosophie. Gerry Sternin n’était pas seulement un praticien de la déviance positive, il incarnait les valeurs de générosité, d’écoute et d’authenticité. Partout où il allait, il créait des espaces où les gens se sentaient valorisés et écoutés. Que ce soit à travers des dîners où chaque invité était invité à participer activement ou à travers ses interventions dans des salles de réunion, Gerry savait transformer n’importe quel espace en un lieu de dialogue et d’apprentissage.

Sa capacité à se connecter avec les autres, à les écouter véritablement et à leur faire confiance était au cœur de son succès. Il ne voyait pas les gens comme des bénéficiaires passifs de son expertise, mais comme des partenaires actifs dans la recherche de solutions.


Une méthode qui transcende les frontières


Aujourd'hui, la déviance positive est bien plus qu'une simple approche dans le domaine du développement. C'est une méthode qui peut être appliquée dans presque tous les domaines de la vie. Des entreprises utilisent cette méthode pour résoudre des problèmes organisationnels, des systèmes éducatifs l’adoptent pour améliorer l’engagement des élèves, et des professionnels de la santé l’utilisent pour changer les comportements face aux maladies chroniques.

L’histoire de la déviance positive nous montre que même dans les environnements les plus hostiles, il y a toujours des solutions, parfois petites, parfois invisibles, mais toujours puissantes. Il suffit de savoir où regarder.


Comment appliquer la déviance positive dans votre propre vie ?


Vous vous demandez peut-être comment appliquer ce concept dans votre propre vie ou dans votre entreprise. Voici quelques étapes simples pour commencer :


  1. Identifiez les modèles de réussite : Quelles sont les pratiques ou les comportements qui fonctionnent déjà bien autour de vous ? Cherchez les individus ou les équipes qui, malgré des circonstances similaires, obtiennent de meilleurs résultats.

  2. Écoutez et observez : Prenez le temps d'écouter attentivement ceux qui réussissent. Quelles sont leurs stratégies spécifiques ? Parfois, les meilleures solutions sont les plus subtiles.

  3. Testez et adaptez : Une fois que vous avez identifié des pratiques positives, testez-les dans d'autres contextes. Il se peut qu'une petite adaptation suffise à transformer une bonne idée en une solution généralisée.

  4. Partagez les connaissances : La déviance positive repose sur la mise en commun des savoirs. Créez des espaces de discussion et de collaboration où les solutions émergent naturellement.

  5. Restez humble : Comme Gerry et Monique l'ont montré tout au long de leur carrière, le respect et l’humilité sont essentiels pour créer des changements durables. Apprenez à reconnaître que vous n'avez pas toutes les réponses et que les meilleures idées peuvent venir des endroits les plus inattendus.


Un avenir transformé par la déviance positive


En fin de compte, la déviance positive nous invite à changer notre façon de penser les problèmes et les solutions. Plutôt que de nous concentrer sur ce qui ne va pas, elle nous pousse à rechercher ce qui fonctionne déjà et à l'amplifier. Cette approche, bien qu'apparemment simple, a le pouvoir de transformer des vies, des communautés et des organisations.

Le monde change rapidement, et avec lui, les défis auxquels nous sommes confrontés. Mais si la déviance positive nous enseigne quelque chose, c'est que les réponses à ces défis existent déjà, parfois là où nous nous y attendons le moins. Alors, êtes-vous prêt à les découvrir ?



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